Alsace
Strasbourg

(U) (MA) (MI) 2 :
le goût du Bon !




2 toques Gault & Millau

                                       


Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le révéler lors d’un premier reportage il y a 3 ans (ici), Umami est mon adresse de prédilection à Strasbourg.

  • Restaurant de poche de 16 couverts unique dans son genre, lové dans le magnifique quartier pittoresque de la Petite France situé au centre historique de la ville, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, il est mené tambour battant par un duo yin & yang, Jessica et René, unis à la ville comme à la scène.

  • Le chef dispose du don de nous éblouir et de faire mouche à chaque envoi. Il réussit tel un alchimiste à fusionner avec justesse et gourmandise, les saveurs tricolores et asiatiques comme personne. Aussi, lorsque j’ai appris que l’établissement avait fait peau neuve, après deux mois de travaux intenses, je n’ai pas pu résister longtemps à l’envie de satisfaire ma curiosité en m’y rendant illico presto, ni surtout au plaisir de partager avec vous ce nouveau périple gastronomique au pays de la 5ème saveur - dite Umami - en mode version 2.0...

    La vie est jonchée de caps. Soit on les franchit en les subissant, soit on les dépasse allégrement en s’en fixant d’autres dans la foulée, histoire de requinquer la motivation. C’est cette option que le chef étoilé René Fieger a coché pour son nouveau plan de route. Le cap des 50è hurlants pointant à l’horizon, il a décidé, en concertation avec sa pétillante épouse Jessica, d’écrire un nouveau chapitre sur son chemin de vie. Leur nouveau challenge, repartir sur de nouvelles bases et donner naissance à un restaurant tout nouveau, tout beau, certes toujours au même emplacement mais alors pour le reste, que de changements...

  • J’avais beau être hyper impatient de découvrir ce qui se cachait derrière ces mystérieuses transformations tenues dans le plus grand secret, connaissant ce restaurant depuis sa création il y a près de 12 ans, j’y suis entré par habitude les yeux presque fermés. Mais lorsque je les ai écarquillés, oh là là, le choc ! Ma surprise a été telle que je me suis dit : « Oups, je me suis trompé d’entrée !!! » Mon ami Marc, webmaster du blog, de rajouter dans la foulée : « Ce n’est vraiment plus le même restaurant ! »

  • Tout a été revu. Sous l’impulsion des restaurateurs, l’espace a été réaménagé par les architectes du cabinet les Agenceurs à Strasbourg. Le restaurant ne s’étire plus en longueur mais se concentre à l’entrée dans une salle plus confinée.

  • Le bar a été déplacé au niveau de la cuisine. Le côté chic, feutré, cosy qui dominait auparavant s’efface pour donner vie à une ambiance plus chaleureuse, plus accueillante, plus asiatique, plus authentique, tout en gardant son côté classe... comme une impression de retour aux choses simples, essentielles, naturelles, sans tralala.

  • Bref, un endroit qui leur ressemble - comme j’ai pu le confier à Jessica et René - où on prend beaucoup de plaisir à prendre place, comme si on était invités chez des amis, et où l’idée du « bienvenue chez nous », nouveau leitmotiv de nos deux amphitryons, prend tout son sens.

  • Le bois et le bleu sont les dominantes du nouveau décor. Le parquet, la marqueterie, les boiseries, les tables en chêne massif sont d’une facture remarquable et personnalisée.

  • Les menuisiers ébénistes Diebolt & Fils de Dettwiller ont fait un boulot de dingue, minutieux, ciselé, avec une vraie fibre artistique.

  • L’acoustique a fait l’objet d’un soin particulier. Mieux insonorisée et dans une ambiance plus tamisée grâce à un magnifique jeu de lumières diffusées par de jolies lampes artisanales en céramique - attention à la tête ! - et des lampions en porcelaine Bernardaud, la salle dégage plus de zénitude qu’avant.

  • Ça tombe bien car les motifs des boiseries, du parquet et des tables en forme d’écailles de poisson ancrent résolument la salle dans des contrées asiatiques.

  • Et petit conseil, n’hésitez pas à visiter les toilettes car elles aussi méritent le détour ! Tellement belles, comme je l’ai dit à Jessica, qu’on a envie de les prendre en photo !!! Sur le chemin, baissez les yeux et attardez-vous sur le remarquable travail de précision du carreleur...

  • La touche d’esthète de la patronne s’affiche ouvertement, notamment dans le dressage soigné des tables, désormais sans nappage pour rendre apparent leur splendide graphisme et sur lesquelles sont disposées de mystérieuses boîtes ainsi que des verres originaux...

  • Jessica a fait appel à un souffleur de verres de Karlsruhe qui lui a conçu une série spéciale Umami, parée d’une pointe bleue au fond du verre, rappelant la couleur du tissu qui habille les murs et le carrelage du couloir.

  • Son sens du bon goût est tel qu’elle avait même teint ses ongles en bleu le jour de notre visite. So chic !

  • Rien n’est laissé au hasard, tout a été pensé dans le moindre détail pour rendre l’espace fonctionnel et assurer le confort et le lâcher prise de leurs clients une fois attablés. Et justement côté prises, vous pourrez même trouver des prises USB le long des banquettes ! Belle marque d’empathie et preuve aussi qu’Umami est un restaurant bien connecté à son époque...

  • Question bon goût, René Fieger n’est pas en reste, puisque toute sa cuisine repose sur le goût du bon, le savoureux, le propre de la fameuse 5ème saveur dite Umami... Le chef officie toujours seul au piano, excepté le soir de notre venue où Cyril, apprenti, a réussi l’exploit de s'intercaler dans sa cuisine microscopique.

    Si la tonalité de ses créations reste inchangée, fort de son savoir-faire et avec la ferme intention de toujours proposer le meilleur, de mieux épouser la saisonnalité du marché, il a décidé de simplifier et resserrer sa carte en ne proposant plus que 2 menus uniques pour un rapport qualité prix absolument remarquable pour un étoilé, le menu Umami - 5 plats à 65 € - et la grande nouveauté, un menu végétarien à 55 €. Mais un vrai menu, recherché, travaillé où on n’a pas l’impression de brouter de l’herbe ou de mâcher le jardin et qui donnerait presque envie de devenir végétarien !

  • Le restaurant désormais n’est plus ouvert que les soirs de la semaine, ce qui permet à René de se libérer du temps pour la réflexion, la création toujours influencée par ses envies, ses rencontres, ses souvenirs de voyages à travers le monde, pour encore mieux sélectionner ses produits et les laisser s’exprimer davantage, et enfin pour peaufiner les détails. Je lui réplique que « Tu as bien raison René, car c’est dans les détails qu’on fait la différence et qu’on signe ses plats ». Sans doute est-ce la raison pour laquelle les syllabes de la nouvelle enseigne (U) (MA) (MI) ont été mises entre parenthèse ? Une volonté peut-être de rentrer au cœur du sens du mot Umami, et d’insister sur leur signification u-mai (うまい, « délicieux ») et mi (味, « goût ») ?

    Réponse que je vous invite à découvrir sans plus attendre au gré du menu que le chef nous a concocté en quasi exclusivité (!), en y ajoutant généreusement quelques plats de son menu végétarien afin de nous faire entrer dans son nouvel univers, et que Jessica a parfaitement accordé avec une jolie sélection de vins :

  • Tout démarre avec deux mises en appétit qui vous mettent tout de suite au parfum.

  • D’une part, le côté territorial en prise directe avec le marché, avec cette salade de pissenlit accompagnée d’une crème de sésame et joues de porc croustillant.

    Puis de l’autre, le côté exotique, avec une renversante bisque de crustacés, orange, gingembre à damner un Saint !

    Champagne Extra brut d’Alexandre Penet.

  • Avant de passer au premier plat, René nous invite à découvrir l’un de ses plats végétariens, un ceviche de cœur de palmier, avocats et marinade au lait de coco qui nous immerge au cœur de la gourmandise.

  • Il nous propose ensuite un doux mariage sucré salé :

    Langoustine en tartare, radis blanc mariné au sudachi - agrumes japonais à l’acidité marquée - et ananas.

    Habituellement je ne suis pas adepte du sucré salé mais ici l’harmonie des saveurs, la justesse de l’assaisonnement, l’acidité du sudachi, rendent le côté sucré évanescent et subliment en fait le côté iodé du crustacé.

    Domaine Cauhapé, Geyser - Jurançon Sec 2017 – Blanc
    Ce vin rassemble les cinq cépages de l’appellation Jurançon : 30% Gros Manseng, 30% Petit Manseng, 30% Camaralet, 5% Lauzet, 5% Courbu et exprime avec finesse et concentration toute la dimension du terroir. Ses arômes d’agrumes et d’épices révèlent une magnifique complexité toute en fraîcheur et une finale persistante et généreuse en bouche. Top.

  • Les embruns marins de nos côtes continuent à parfumer l’assiette avec ses noix de Saint-Jacques poêlées, escortées d’une salade de carottes, d’une sauce kéfir (lait fermenté), de tamarin (datte indienne) au goût acidulé, et rehaussées de basilic thaï.

    Riesling GC Ollwiller bio2014 P-H Ginglinger Eguisheim.

    Un vrai riesling territorial, sec, vertical, d’une acidité vive, qui attaque direct en bouche. Fraicheur, harmonie, finesse du bouquet dévoilant de subtils arômes floraux, d’agrumes de fruits blancs. Joli gras en milieu de bouche. Un grand Riesling.

  • Retour dans l’univers végétal du chef avec de sublissimes ravioles farcies de tofu et d’épinard reposant sur un lit de roquettes et arrosées d’un bouillon miso (pâte fermentée relativement salée). Un plat vraiment extraordinaire qui émeut les papilles et simplement bon, un plat Umami en somme !

    Bourgogne Les Setilles Olivier Leflaive.

    Arômes d’agrumes et de pêche, de fleurs blanches se démarquent sur une belle touche minérale, typé chardonnay. Attaque gourmande et jolie finale.

  • L’empreinte asiatique s’ancre résolument avec un magnifique dos de lotte cuit à la perfection, laqué au miso, arrosé d’une sauce au beurre blanc, Dashi (bouillon d’algues de konbu et de bonite séchée) et accompagné de chou chinois.

    Pinot blanc Domaine Weinbach bio 2017, 70% Pinot Auxerrois, 30% Pinot Blanc.

    Cette cuvée est issue du Clos des Capucins sur un terroir de graves. Cueillette du raisin à maturité optimale qui confère au vin de la délicatesse et des notes de fruits frais, de pommes. Bouche ample, droite, friande, d’une grande pureté aromatique.

  • Retour sur terre avec une poitrine de canard des Landes, navets, champignons, galette farcie, de la cuisse confite et sauce hoisin (sauce barbecue chinoise). Un plat gourmand où la justesse de la cuisson se démarque.

  • Concomitamment, Jessica nous présente un dernier plat végétarien, Butternut, champignons eryngii et jus aux 5 épices. Un plat miam miam. Suis-je en train de me végétaliser ? Est-ce grave docteur ?

    L’enfer. Domaine Jaulin-Plaisantin. Chinon rouge Cabernet Franc. Bio.

    Nez droit et net, sur le fruit rouge. Bouche élégante. Charpente acide, fruit et matière bien en équilibre. Bonne longueur finale avec cependant une certaine astringence. Pour être franc comme le Cabernet, cela n’a pas été mon accord préféré !

  • Tout finit en douceur et en fraîcheur avec un dessert dit de cuisinier, un crémeux de chocolat blanc accompagné de pomelos, pandan (herbes de Thaïlande), sorbet coco, céréales et coulis au caramel... Un régal alors que je n’apprécie pas le chocolat blanc. Faire confiance au chef, règle numéro 1 lorsqu’on va à Umami, il saura vous faire aimer ce que vous n’aimez pas !!! Trop fort, non ? Je vous laisse une heure pour méditer sur cet aphorisme !

  • Jessica nous propose ultimement une belle sélection de thé et infusions de la boutique Thématis à Strasbourg / Neudorf.

    On a beau avoir l’impression de connaitre un restaurant par cœur, et même si chaque visite ici est une découverte, jamais je n’aurai pensé éprouver une telle émotion gastronomique, une telle résonance gustative. Pourtant les bases sont les mêmes que par le passé, mais tout semble maintenant sublimé, concentré, précisé, net, direct, en adéquation avec le décor, l’ambiance. Le goût du bon, la saveur Umami qu’on a tant de mal à définir, tellement elle est subjective et ineffable, semble transcendée et se révèle encore plus qu’avant, je trouve. Plus qu’une 5è saveur, je dirais que c'est une sensation exquise, appétente, gourmande qui submerge les papilles et qui crée des envies de reviens-y et des états d’extases culinaires insoupçonnés !

    Une cuisine fusion, créative, aventurière, parfois audacieuse, personnelle, variée, instinctive, aux cuissons idéales, qui allie toujours avec justesse et équilibre une effusion de saveurs parfumées d’exotisme à dominante asiatique et de classicisme. Une cuisine qui remue les 5 sens, les émoustille, les effleure avec délicatesse, les émeut, les berce, les réveille, les bouleverse, sans pour autant tomber à la renverse car les créations restent maîtrisées et compréhensibles.

  • Un chef épanoui, serein, visionnaire, au sommet de son art, plus que jamais motivé après le franchissement de ce nouveau cap, qui, même si ce n'est pas l'objectif, semble « cap » d’en atteindre un autre très vite, celui de la 2è étoile, et qui prend surtout énormément de plaisir à faire plaisir, ce qui respire dans l’assiette. Une patronne radieuse, heureuse, naturelle, ravie de nous avoir fait découvrir son nouvel écrin. Un couple d’une immense sympathie et d’une grande humilité, qui préfère l’ombre à la lumière des buzzs des réseaux sociaux, du quant à soi des salons mondains, des congrès, concours et autres manifestations médiatiques en tout genre, car ce qui leur incombe c’est d’être présents avant tout dans leur restaurant afin de toujours satisfaire au mieux leurs clients.
    Je tiens tout de suite à rassurer les afficionados, ils y arrivent toujours aussi bien et chose importante qui faisait partie de mes interrogations, ils ont réussi à préserver l’esprit d’Umami. Ouf ! Seule l’enveloppe corporelle a mué en une version plus concentrée sur la quintessence du produit et où le chef étoilé nous invite à plonger dans le cœur des saveurs...

    En fait plus qu’un changement, un renouveau, c’est une métamorphose, dixit Marc. Paraboliquement, la chrysalide s’est muée en papillon, qui sélectionne et butine joyeusement les meilleures fleurs, sublime ensuite leur nectar dans l’optique de nous faire encore plus découvrir le goût du bon, du savoureux...

    Sans aucun doute, mon meilleur repas à Umami que je vous recommande vivement d’aller (re)découvrir si vous êtes prêts à être surpris gustativement et d’y vivre alors à votre tour l’aventure de la 5è saveur. Vous arriverez peut-être mieux que moi à l’appréhender et à la définir ! Conseil d’ami, pensez à réserver de la part du blog, une attention personnelle vous sera réservée mais attention prenez vous-y à l’avance !

    Crédits photos : Christophe se met à table


    Dernière visite en mars 2019


    Restaurant Umami, 8 rue des Dentelles 67000 Strasbourg

    Tél. : 03 88 32 80 53    





    

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