Paris
1er

AG Les Halles : "y a de la joie !"


Je ne sais pas si Charles Trenet a conçu son succès “y a de la joie” dans ce lieu, mais à peine franchi le seuil du restaurant AG les Halles à Paris, vous entrez dans un univers joyeux, gai, un lieu de vie, de passage, de convivialité.

  • Situé en plein coeur du quartier des Halles - ancien quartier symbole des commerces de bouche - redoré depuis peu par la construction d’un nouvel ensemble architectural, la Canopée, magnifique voûte céleste (même si le choix de la couleur est discutable) qui redonne du lustre à ce quartier, le bistrot comptoir offre une décoration réussie et doucement colorée. Mariage d’Art nouveau, superbe verrière classée aux Monuments historiques, d’Art industriel, magnifique lustre en fer forgé et d’Art plus contemporain, éblouissante fresque murale d’inspiration cubiste, que Picasso n’aurait pas reniée, et pour finir un monumental bar en zinc de 13 mètres de long, le plus long de Paris parait-il. Le Chef a eu un coup de cœur pour l’endroit, et, respectueux du passé, il a voulu en garder l’esprit en lui apportant des touches plus contemporaines pour l’ancrer dans l’air du temps avec l’apport de tables sur mesure en bois finlandais, d’un mur végétal et de très beaux canapés en velours... Un décor joyeux singulier qui annonce la couleur et qui révèle bien l’esprit du Chef.

  • Parlons en du Chef ! Mais quel Chef, quelle jolie rencontre, quel exemple de vie, quel parcours, quel personnage romanesque. Riche d’une culture cosmopolite, africaine, libanaise, américaine, australienne, italienne, praguoise, qui influence toujours sa cuisine, c’est en France, patrie de la gastronomie par excellence qu’il décide de forger son destin et de creuser son sillon. C’est en regardant sa maman mitonner des heures durant ses bons petits plats, comme ce poulet fermier confit, cuit avec un ragoût de chou, ratatouilles, servi avec du riz pilaf, qu'il a eu le goût pour la cuisine. Durant son service militaire au Liban, il a su que la cuisine serait son métier. Arrivé à Paris sans parler français et sans le moindre sous en poche, il passe ses premières nuits à la belle étoile. De petits boulots (carreleur, peintre, commis, plongeur) en petits boulots, il ne lâche rien, croit en sa bonne étoile et gravit les marches, jusqu’au jour où il se fait remarquer en remplaçant au pied levé son Chef de l’époque emmené soudainement aux Urgences ! À quelque chose malheur est bon, il a pu ainsi prouver à ce dernier toute l’étendue de son talent, resté enfoui jusqu’alors... et à partir de là l’ascenseur du destin de la providence ne s’arrête plus. Il découvre au gré d’une balade le restaurant Nicolas Flammel, le célèbre alchimiste découvreur de la pierre philosophale, rachète le restaurant après avoir convaincu ses financeurs, devient alors une référence à Paris et se fait affubler du titre d’alchimiste des saveurs. Mais se sentant un peu à l’étroit, le personnage de Nicolas Flammel lui collant trop à la peau, il décide de créer un autre restaurant afin d’y affirmer sa véritable identité : l’ AG St Germain, inscrivant au passage ses initiales dans son enseigne (très joli logo) et, en novembre dernier, il présente son dernier bébé, l’AG les Halles.

    Son parcours, modèle d’intégration à la française, est vraiment extraordinaire, quelque part rassurant. Cet être atypique, hors norme, self-made-man autodidacte, prouve qu’avec de l’obstination, du courage, de la patience, de la passion et surtout du talent on peut réussir. Là où il y a une volonté, il y a un chemin ! Cet être d’une humanité inextinguible, d’une gentillesse ineffable, à la faconde aisée, sait se montrer sincèrement disponible dans un esprit de partage, pour nous expliquer qu’il n’oublie pas cependant d’où il vient, qu’il a travaillé d’arrache-pied et a mis 22 ans pour en arriver là. Je cite : “à un moment, le travail paye tant qu’on reste soit même”. Conscient de ressentir une pression grandissante émanant de la sphère médiatique, de la reconnaissance de ses pairs, des nombreuses sollicitations qu’on lui propose, il reste humble, simple et affirme que son seul moteur et sa seule satisfaction professionnelle c’est de voir ses clients heureux ! "Pour cela, me dit-il, il faut continuer à travailler dans la bonne humeur, avec le sourire, sans mettre de pression malsaine et inutile à son staff et surtout ne pas se prendre la tête." La reconnaissance des guides viendra au moment opportun...

  • Boxeur à ses heures perdues pour y puiser énergie, relaxation, inspiration, son véritable combat, il le livre avec l’assiette. À la quête de l’excellence, il boxe sans violence avec les saveurs, les richesses des produits de saison d’ici et d’ailleurs. Des éléments incontournables signent sa cuisine : fleurs comestibles, yuzu, piment d'Espelette, oignons grelots, crème de sésame noir ou encore quatre épices, cannelle. En ébullition permanente, il vit de et pour sa passion, il met en place une cuisine innovante, exigeante, il met 10 jours à créer un plat me révèle-t-il. Il entre en osmose avec le produit, le sublime pour délivrer une pépite. Conscient que des milliers de Chefs sont meilleurs que lui techniquement, dit-il modestement, il clame avec enthousiasme : "Battez-vous pour faire votre cuisine, celle qui vous ressemble, enrichissez-vous de vos expériences mais ne copiez pas !” Son credo est de dire "lorsque tu prends une assiette, tu dois savoir ce qui va se passer derrière pour que le client ne soit pas déçu, qu’il entre dans ton univers et qu’il comprenne l’histoire que tu vas lui raconter". Une fois capturé et captivé, tel un bon roman, le client n’a plus qu’une envie tourner les pages jusqu’au dénouement de cette intrigue gourmande !

    J’écris souvent que la cuisine est le miroir du Chef, ici c’est encore plus vrai, au point de ne plus savoir qui est le miroir de qui !!! Généreuse, abordable, ensoleillée, festive, récréative, voyageuse, joyeuse, joliment dressée dans des assiettes design, elle vous donne le sourire mais attention les apparences peuvent être trompeuses. Ici point d’improvisation, de cuisine minute, Alan est pointilleux, sa cuisine est nette, millimétrée et tirée au cordeau, les cuissons pico bello. Tout est maîtrisé, tout en s'amusant. Du sérieux sans faire sérieux, il n’y rien de mieux. Que pensez-vous de ce slogan ? !!!

  • Entouré d'une équipe jeune et soudée, dont Maxime, un maître d’hôtel sommelier alliant professionnalisme et sympathie, Alan nous a proposé un menu inspiration de haute volée, digne d’un étoilé mais avec les excès pour le portefeuille en moins - excellent rapport qualité prix pour Paris - où le beau n’a pas pris le pas sur le bon, respectant la trilogie chère au Chef, oeil/nez/bouche avec un accord mets vins bien sentie en partie inspirée par une sélection de l’incomparable Pascal Leonnetti de passage dans le restaurant quelques jours avant nous, à l'occasion d'une soirée évènementielle.

    Pour aiguiser le palais, le Chef nous incite à plonger une mini-brioche (sa madeleine de Proust me confie-til) dans une sélection d’huile d'olive et d’épices.

  • Le ballet des réjouissances gourmandes débute avec deux amuse-bouches : Velouté de chou-fleur rehaussé d’un espuma Café, sarrasin torréfié, huile d'olive Craquant de riz soufflé / Beurre de cacahuète, Ketchup de betterave et tarama.
    Domaine du Château de Pierreclos St Véran 2012
    Vin riche, gourmand, pur, soutenu par une belle fraîcheur.

  • Notre joyeuse balade démarre vraiment avec une première entrée aux chromatiques méridionnales prononcées. Poulpe / Houmous aux fines d'herbes / Grenades /Tagliatelles de courgettes / Sésame noir . La délicatesse de l'houmous ne prend pas le dessus sur les autres saveurs et lie le plat de manière harmonieuse.
    Domaine du Colombier Fourchaume Chablis 1er cru 2014
    Agrume marqué, sec par excellence avec un soupçon de « pierre à feu », très bonne longueur en bouche.

  • L'Euphorie nous gagne avec cette excellente composition qui résume le mieux l'esprit du chef, finesse, joliesse et justesse : Oeuf bio parfait (vraiment parfait insiste Maxime !!!) / poêlée de girolles et de cerises / feuilles de betteraves
    Domaine Michelot Les Narvaux Meursault 2011
    Arômes d'orange confits caractéristique du terroir, superbe minéralité beaucoup de finesse, et d’opulence, avec une belle longueur mais sans lourdeur, sans conteste le meilleur flacon de la soirée.

  • C'est le Chef lui-même souriant et avenant qui nous fait l'honneur de servir et de détailler le plat suivant, un peu plus sage que le précédent mais toujours excellemment exécuté et d'un goût exquis Filet de maigre d'Atlantique Nord / Tartare d'Algues & Huîtres / Risotto vénéré / Choux fleur violet / Huile et fleur de bourrache / Beurre blanc Yuzu Epinard
    Domaine Theunot Juillot Château Mipont Mercurey 2014
    Vin jeune qui a besoin de s'ouvrir, mais le nez dégage déjà de beaux arômes de fruits noirs. En bouche, le vin est encore ferme, charpenté, mais le fruit est présent et les tanins prometteurs...

  • L'heure récréative a sonné avec cette noisette d'agneau, déclinaison de carottes, qui ont l'air de sauter de joie dans l'assiette, et sa pelote de spaghettis de Vitelottes
    Domaine de Cantaussel Vin de pays des côtes du Brian 2010
    Vin décontracté, à dominante de Carignan et de Grenache. Robe grenat, nez assez complexe, arômes de pâte de fruit, avec une note minérale et un tanin marqué.

  • Un super dessert signature du Chef donne le sourire, le no-cheese cake, créé suite à un ratage.. plutôt que de le benner, le Chef le fait goûter à sa brigade qui l'apprécie beaucoup... "Eh eh Chef, il est super ce dessert, allez on va faire un jeu et on va l'appeler le no cheese cake et on va voir comment les clients vont l'accueillir ..

    Et voilà comment naît un dessert devenu culte... Ce plat résume la persévérance d'Alan et sa manière de toujours positiver. Se dire que même dans l'échec, on peut y trouver les sources pour rebondir.

  • La joie devient allégresse avec l'ultime dessert, une superbe réalisation aérienne onctueuse : cassis / framboise / sureau
    Crémant d'Alsace Albert Mann Extra brut 2012
    Nez expressif, d'une grande finesse. Belles notes fruitées, les fruits à chair blanche, poire, compote de pomme et les agrumes. Les bulles sont fines. Il Passerait mieux cependant en apéritif ou avec un fromage qu'en dessert par ses côtés secs, extra brut.

    Cet hymne à la joie se termine avec un financier au thé vert rehaussé d'un chocolat diamant.

    Une jolie pastille de Bonheur vivifiante, enivrante et déstressante qui devrait être prise en charge par la Sécu ! Un moment de joie qui nous incite définitivement à entonner en sortant du restaurant cette joyeuse chanson en l’honneur du Chef et que son fils pourra reprendre à l’occasion, puisque ce dernier aurait confié à sa maîtresse qu’il aimait chanter des chansons qui donnait de la joie. Ouf la relève est assurée chez les Geaam !!!

    Y'a d'la joie bonjour bonjour Alan Geaam

    Y'a d'la joie dans le ciel par-dessus le toit

    Y'a d'la joie et du soleil dans tous les plats

    Y'a d'la joie partout y a d'la joie

    Merci Alan...

    Crédits photos : Christophe se met à table


    Dernière visite en juin 2016






    Restaurant AG LES HALLES - 14, Rue Mondétour - 75001 Paris, France +33 1 42 61 37 17    Lien





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